LA PRISON POURRAIT SE PRÉSENTER SOUS UNE AUTRE FORME
 
 
 

Le développement économique de nos civilisations a pour médaille d'améliorer le bien-être des gens. Mais il a pour revers la progression de la délinquance de par les moyens techniques plus importants de faire du mal. S'y ajoute la perte des valeurs morales avec l'affaiblissement des religions, chrétienne surtout. Et aussi une jeunesse pas assez bien encadrée pour avoir de bons repères du fait de l'inexistence de l'autorité parentale dans des familles décomposées. D'où il résulte des problèmes de police et de justice de plus en plus lourds.

 
 
 

Maintenant il faut bien dire que la façon dont on réprime le mal à présent n'est pas très originale car il n'y a que trois types de sanctions en fait : l'amende, la prison et la peine de mort dans certains pays qui l'appliquent encore. L'amende peut s'infliger à n'importe qui mais ne se porte pas au casier judiciaire, n'étant prévue que pour des délits mineurs. La peine de mort tendrait à disparaître en dépit de la résistance de quelques États, mais la plupart d'entre eux l'ont déjà supprimée ou ne l'exécutent pas. Et donc c'est par la prison que les crimes et délits sont sanctionnés dans la majorité des cas.

 
 
 

Mais le problème qui se pose presque partout à l'heure actuelle c'est celui des conditions déplorables dans lesquelles vivent les prisonniers de droit commun. En France, bien que les femmes incarcérées soient à peu près vingt fois moins nombreuses que les hommes et que la population carcérale par rapport à celle du pays soit en proportion huit fois moindre qu'aux États-Unis par exemple, les prisons y sont quand même surpeuplées.

 
 
 

Il faudrait en bâtir d'autres et moderniser celles qui existent déjà. Mais tout ça coûte et c'est une dépense qui n'est jamais vue comme prioritaire par quelque gouvernement que ce soit, fut-il de droite ou de gauche. Or la manière dont on emprisonne à présent est une honte pour un pays tel que le nôtre considéré en général dans le monde comme à la pointe de la civilisation.

 
 
 

Pourtant un détenu dispose d'un minimum de confort vu comme indispensable pour rendre supportable la pénibilité de l'incarcération, laquelle peut durer des années voire des décennies. Mais c'est bien souvent sans y parvenir, surtout à cause de la surpopulation carcérale. Qui plus est, aussi élémentaire soit-il, tout élément de confort en prison coûte tout en posant des problèmes de sécurité, à commencer pour le détenu lui-même, en lui donnant la possibilité de se pendre avec des draps ou des pièces de vêtement par exemple.

 
 
 

Telle qu'elle se fait à présent, la prison a fondamentalement deux défauts. Tout d'abord le fait que des gens qui ont mal agi soient en relation constante les uns avec les autres et constituent ainsi une mini société d'un genre bien particulier. Et ensuite le fait que l'étalonnage dans l'échelle d'une condamnation ne le soit qu'en fonction d'un certain temps de privation de liberté, sans tenir compte des conditions de détention, très variables suivant l'endroit où on est incarcéré.

 
 
 

En principe si on emprisonne c'est d'abord pour protéger la société en mettant hors d'état de nuire des individus jugés dangereux. Mais en même temps il y a, depuis toujours et partout, le fait de « punir » par un internement d'une durée variable en fonction de la gravité de la faute commise. Et c'est surtout pour ça qu'on incarcère sur un plan fondamental. Parce qu'autrement on ne devrait pas remettre ainsi librement en circulation au terme de sa peine quelqu'un qui soit porté à mal faire en lui donnant la possibilité de recommencer.

 
 
 

Si quelqu'un est véritablement « dangereux », la seule solution convenable ce serait de l'enfermer à titre définitif quoi qu'il ait fait. Et d'autre part la punition par privation de liberté dans les conditions d'incarcération actuelles est tout à fait négative pour le détenu quand elle est prévue pour durer aussi longtemps. En l'occurrence le remède est pire que le mal.

 
 
 

On pourrait envisager une autre façon de faire, les choses se déroulant en trois temps. D'abord la préventive avant le verdict pour les besoins de la procédure en cours et la recherche d'éléments nécessaires à l'enquête, le temps qu'il faut pour bien connaître la vérité. Mais en application du principe de la présomption d'innocence les conditions de détention devraient y être bien meilleures que de ce qu'il en est à présent, ce qui serait faisable avec les prisons existantes mais nettement moins encombrées s'il ne s'y trouvait que ces gens-là, soupçonnées seulement, les seuls impératifs n'étant que de ne pas pouvoir évoluer librement hors de l'enceinte de rétention, et d'être désarmé aussi bien sûr.

 
 
 

Puis il y aurait la punition proprement dite si le principe veut qu'il en faut une. Et donc voulue comme telle sous la forme d'un emprisonnement sévère certes, mais ne durant que quelques mois en fonction du degré de faute commise sans jamais dépasser un an. Pour ça il faudrait une évidence de culpabilité, avec des aveux complets de préférence. Le meilleur moyen de les avoir ce serait que son auteur accepte une telle sanction, en sachant qu'elle ne devrait pas durer trop longtemps. Ce pourrait être un choix par rapport à ce qui existe à présent.

 
 
 

Concrètement cela s'apparenterait un petit peu au « mitard » à l'intérieur des prisons actuelles, s'appliquant à la convenance de l'autorité pénitentiaire et de façon circonstancielle. Alors que ce ne devrait être qu'au terme d'un jugement en bonne et due forme dans ce qui est envisagé.

 
 
 

Le détenu ne devrait avoir à sa disposition aucun objet pouvant être dangereux avec le minimum d'ingéniosité. Par exemple un rasoir, alors que d'être rasé n'a rien d'indispensable dans sa situation en fait. Et de même on pourrait se passer d'éléments de confort courants qui sont du « luxe » en quelque sorte quand ils ne sont pas indispensables pour vivre, tout en pouvant servir éventuellement à se faire du mal. En particulier les pièces de vêtement et les éléments de literie, à simplifier au maximum et de composition telle que cela soit inoffensif.

 
 
 

Il y aurait donc comme première règle de ne donner que le strict nécessaire au fonctionnement de l'organisme. Et comme deuxième qu'il n'y ait jamais aucun contact entre deux détenus. D'abord parce que chacun a son propre problème, lequel n'est résoluble qu'avec l'aide de psychologues éventuellement. Ensuite parce que l'influence d'un détenu sur l'autre est la plupart du temps malsaine. C'est une concertation aux effets maléfiques. Et donc la « pénibilité » ne serait plus dans le manque de liberté plus ou moins longtemps comme actuellement, mais dans le fait d'être dans la solitude et le dénuement quelques mois durant.

 
 
 

Les seules personnes avec qui le détenu pourrait bavarder ne seraient que ses gardiens, moins dans ce rôle que dans celui de confidents en quelque sorte car ayant une formation de psychologues. Et la discussion se ferait depuis la cellule (forcément individuelle) où le détenu se trouverait grâce à un jeu de micros et de caméras (du genre « Webcam ») permettant l'audition et le visionnage dans les deux sens, pour exposer peut-être ce qui l'avait poussé à mal faire, tout en parlant aussi de ses problèmes d'ordre matériel bien sûr.

 
 
 

Chaque cellule serait insonorisée pour pouvoir causer en toute discrétion. Et on n'en sortirait que très rarement et à tour de rôle accompagné d'au moins deux personnes disposant d'incapacitants en cas de problème. Bien entendu pendant cette phase de détention des visites médicales régulières permettraient de voir que les détenus restent en bonne santé. Ce faisant ils seraient forcément moins nombreux qu'à présent. Et leurs conditions d'internement étant simplifiées au maximum cela ne devrait pas coûter très cher.

 
 
 

Enfin dans une troisième phase il y aurait soit un internement définitif pour les individus qui sont restés potentiellement dangereux mais dans des conditions de détention aussi proches que possible de la normale pour les gens ordinaires, soit la liberté pour les autres mais surveillée éventuellement par exemple avec un bracelet à la cheville. Dans le premier cas la détention ne prendrait fin qu'en fonction de ce qu'estimeraient psychiatres et psychologues suivant les détenus en permanence, la criminalité étant alors traitée comme une maladie mentale.

 
 
 

Cela pourrait se faire par exemple dans une île où on évoluerait librement mais dans un contexte technologique excluant toutes possibilités de faire mal à qui que ce soit. Qui plus est, du fait de l'isolement d'un tel territoire interdit à tout autre usage, on ne pourrait pas s'en évader. Et on n'en aurait même pas envie. Toute l'île serait sous surveillance à l'aide de caméras. En cas de conflits on ne se servirait que d'incapacitants, nulle arme à feu ne devant se trouver sur l'île. Et d'éventuelles communications avec l'extérieur ne se feraient que par vidéo.

 
 
 

Lorsque Napoléon se rendit aux anglais ceux-ci l'emmenèrent à Sainte-Hélène, endroit particulièrement difficile d'accès avec la marine à voile de l'époque. Et c'était pareil pour en sortir. L'empereur déchu pouvait donc y évoluer en toute liberté sans risquer de revenir comme il en avait été de l'île d'Elbe auparavant, ce qui était le but recherché. Et pas besoin de l'enfermer ni de l'enchaîner pour cela. Voilà donc le type de « perpétuité » applicable dans de tels cas de figure.

 
 
 

En l'occurrence on vivrait dans un confort relatif pouvant peut-être donner aux gens honnêtes un sentiment d'injustice. Mais ce qu'il y a de moins juste en fait, c'est qu'il y a toujours actuellement des crimes qui sont véritablement impunis parce qu'on n'en trouve jamais les auteurs. Comme par exemple la disparition d'enfants sans que cela ne laisse la moindre trace.

 
 
 

Disons encore une fois que la justice n'est pas de ce monde mais qu'il doit y en avoir une autre dans l'au-delà si on y croit. C'est la raison pour laquelle l'aspect « punition » du jugement humain devrait se voir comme secondaire, la priorité devant être d'empêcher la malfaisance de se faire, en l'anticipant d'une part et en mettant leurs auteurs « à l'écart » aussi longtemps que possible de l'autre.

 
 
 
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